Jeunesse et simplicité des espaces publics : vers le retour de l’émerveillement ?

Longtemps, les rues, placettes, parcs et places des villages ont été les théâtres vivants de la jeunesse. On y courait, on y jouait, on y grandissait : aujourd’hui, l’absence des enfants dans ces lieux est un phénomène observé. Comment faire revenir les enfants dans l’espace public sans tomber dans la démesure ou l’artificialité ?

Mots clés : paysage, aménagement, ménagement, frugalité, école, biodiversité, jeux, enfants

À l’heure des écrans, du tout-voiture et de la multiplication des préoccupations sécuritaires, les enfants ne jouent plus dans la rue, ou si peu. Face à cette réalité, l’Atelier d’urbanisme en Livradois-Forez a lancé une réflexion sur la manière dont nous aménageons les espaces publics et la place que nous laissons à l’émerveillement des enfants.

Afin de répondre à ces problématiques, l’Atelier d’urbanisme en Livradois-Forez a organisé un voyage d’étude le 26 juin dans les communes de Dorat, Thiers, Marat et Augerolles pour voir quels aménagements permettaient aux enfants d’aller dehors. Un aperçu de différents projets portés par ces communes montre une évidence: il faut retrouver la capacité de voir le monde à hauteur d’enfant pour concevoir des lieux plus simples, plus naturels, plus propices à l’épanouissement de la jeunesse.

Une cour d’école réinventée à Thiers

La cour de l’école Georges Sand à Thiers fait l’objet d’une requalification audacieuse et frugale. Dans l’attente d’une requalification générale de la cité scolaire, l’équipe d’architecte SCOP Lao, dans le cadre d’une assistance à maitrise d’usage, a initié une requalification de la cours d’école… avec les moyens du bord. Ainsi, une partie de la cours initialement en enrobé, a été décroutée pour retrouver du sol perméable. Les chutes d’enrobé ont été réutilisées sur place pour créer un muret d’assise. Pour végétaliser, des bacs en bois ont accueilli des plantes vivaces. Concernant le mobilier, pas d’achat sur catalogue : le collectif d’architecte a installé des rondins de bois à même le sol faisant office d’assise ou de jeux. D’anciennes jardinières de la commune ont été transformées en banc.

Cette partie de la cours offre désormais une ambiance créative, ombragée, qui laisse la possibilité aux enfants de s’inventer un monde bien à eux

Requalification de la cour de l’école George Sand (Thiers) © PNRLF

L’école du dehors à Dorat : apprendre de la nature

À Dorat, les enseignants osent l’aventure de l’école du dehors. Une fois par mois, la classe s’installe dans le verger attenant, au bord d’une mare, sur des tapis posés dans l’herbe. Les aménagements ? Un simple verger, une haie vive, une mare. Ici, la nature fait école. Les mathématiques et le français se conjuguent avec les saisons et les éléments ; on observe, on manipule, on cherche des solutions dans son environnement pour résoudre un problème – souvent mathématique, parfois bien plus large. Cette pédagogie vivante, portée par les enseignants, apprend aux enfants l’entraide, la débrouillardise, la curiosité. Le dehors n’est pas qu’un décor : il devient acteur de l’apprentissage. Cette simplicité choisie, sans artifice, fait naître une nouvelle relation à l’espace et aux autres…dès le plus jeune âge.

Verger accueillant l’école du dehors © PNRLF

La zone humide de Marat : un patrimoine à préserver et à découvrir

À Marat, la réhabilitation et la mise en valeur d’une zone humide constitue un autre bel exemple d’aménagement et de simplicité.  Cette démarche environnementale et éducative vise à permettre aux jeunes – mais aussi aux habitants de tous âges – de découvrir la richesse d’un milieu naturel souvent méconnu. Un parcours pédagogique, des pontons en bois, des zones d’observation invitent à la contemplation et à la découverte. Là encore, la simplicité de l’aménagement (matériaux naturels, interventions minimales) respecte l’écosystème tout en offrant un espace de jeu et d’exploration pour les enfants.

Mise en valeur de la zone humide de Marat © PNRLF

Se remettre dans la peau d’un enfant : une nécessité pour l’avenir

Le CAUE 63* a imaginé un jeu à destination des élus et des techniciens pour aider à retrouver notre âme d’enfant. C’est dans les rues d’Augerolles, qu’une quinzaine de techniciens et élu se sont mis à la place d’enfants de 6 ans, 10 ans ou 16 ans pour imaginer d’autres aménagements pour préserver l’émerveillement. Ces projets peuvent aller de la création d’un cheminement dans la nature à la sécurisation de la traversée d’une route départementale, en passant par l’installation de mobiliers ludiques ou juste d’un lieu intime pour fabriquer une cabane…

Cette rencontre de l’Atelier rappelle une nécessité fondamentale : lorsqu’il s’agit d’aménager un espace public destiné à la jeunesse, il faut se remettre à la place de l’enfant. Que recherche-t-il ? De la liberté, de la diversité, des cachettes, des surprises, du contact avec la terre et le vivant… En redonnant à l’enfant sa place d’acteur et de concepteur, les communes peuvent favoriser l’inclusion, la santé, la créativité et l’autonomie. La simplicité d’aménagement – loin de la banalité ou du manque d’ambition – devient ici synonyme de richesse : richesse d’usages, de sensations, d’expériences.

*Le Conseil Architecture Urbanisme Environnement du Puy-de-Dôme est une association dont le but est de promouvoir la qualité de l’architecture, de l’urbanisme et de l’environnement sur le territoire du département. Les collectivités locales, les administrations, les établissements publics et les particuliers peuvent le consulter en amont de leurs programmes ou de leurs projets. Les préconisations de ses professionnels (architectes, urbanistes, paysagistes), dégagées d’intérêts économiques, sont une aide à la décision pour les actions aux diverses échelles des territoires.

 

 

 

 

 

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